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L’immortalité pour tous

mars 26, 2010

Est-ce que c’est juste moi ou bien tout le monde a-t-il enfin accepté la mort ? Plus personne ne parle d’immortalité. Moi je me rappelle d’avoir grandit dans une culture où Queen chantait des hymnes à Highlander, ou les méchants de cartoons et d’Hollywood faisaient tout ce que la morale reproche pour vivre un peu plus longtemps.

On pourrait blâmer Six Feet Under, qui a mis à la mode une approche plus in your face de la mort. Mais le vrai truc qui s’est passé, qui fait qu’on n’a plus si peur de la mort, c’est peut-être qu’on est tous devenus immortels sans le savoir.

Nous vivrons tous pour toujours dans les serveurs de Facebook.

Ça fait des siècles qu’on cherche et jusqu’ici la seule forme d’immortalité qui marchait, c’était celle des Victor Hugo et des Franz Ferdinand, qui vivent éternellement à travers leur œuvre ou leur histoire. Les historiens du futur pourront en savoir plus sur nous que sur Shakespeare ou Andy Warhol.

Le mort 2.0 laisse derrière lui un profil Facebook (dont le sort post mortem est de plus en plus formalisé) qui raconte ses états d’humeurs quotidien, ses passes temps, son score à Mafia Wars et tout un tas de ces trucs inutiles avec lesquels il a passé le temps en attendant la mort. Il nous laisse aussi une page Last FM qui raconte ce qu’il a écouté de son vivant, une carte sur Foursquare des endroits où il a été, la liste de ses restaurants favoris sur Yelp, peut-être même la liste des bouquins qu’il a lu sur Library Thing et ses films préférés sur Glue. Il aura peut-être même laissé derrière lui une page Flavors.me pour que quiconque le cherche puisse tout savoir sur lui en un seul endroit.

Tout le monde a déjà écrit sur la nouvelle génération d’internautes et sa notion toute particulière de la vie privée. Généralement, on convient qu’elle vit dans une sorte de flux permanent, ignorante de toute notion de futur ou de conséquence. Pourtant, elle passe son temps à enregistrer tout ce qu’elle fait de façon obsessionnelle. Même plus besoin d’un blog pour raconter sa vie, tout un maillage d’applications le fait automatiquement.

Même s’il y a de forte chance que dans cinquante ans votre profil Facebook n’intéresse plus grand monde à part des bots statisticiens, c’est le plus prêt qu’on n’aura jamais été de l’immortalité pour tous. Derrière nous on laisse un gros tas de trivialités, de listes d’amis et de preuves d’une vie vécue à travers les autres. C’est tout.

Ta vie intérieure, tes rêves et ce roman que tu n’écriras jamais, le web il s’en fout. En vrai, le monde entier s’en fout. C’est pas parce que t’es immortel que ta vie a plus de sens.

2 commentaires leave one →
  1. mars 26, 2010 16:31

    (on devrait mettre l’accès aux coms en fin de billet…)

    C’est très vrai ce que tu dis, tu es fantastique camarade collègue !

  2. mars 28, 2010 17:08

    Et c’est long, l’immortalité, surtout vers la fin …

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